Justice

La tension monte à la cour d'assises de l'Yonne lorsqu'un témoin arrive à la barre

La tension monte à la cour d'assises de l'Yonne lorsqu'un témoin arrive à la barre
Un homme est venu témoigner devant la cour d'assises de l'Yonne ce mercredi 3 juin. (Photo d'illustration) © cindy bonnaud
Après une longue étude des personnalités des quatre accusés, dans une affaire de vol avec violence et de recels, un témoin clef est venu témoigner devant la cour d'assises de l'Yonne. D'un coup la tension est montée du côté des accusés, ce 3 juin 2020.

Innocents. Trois des accusés, jugés depuis mardi 2 juin par la cour d'assises de l'Yonne, se disent innocents. Ces trois hommes, poursuivis pour le recel de deux voitures, n'étaient pas là le 28 juin 2015 lorsqu'un couple de traiteurs s'est fait braquer la recette d'une soirée et leurs deux voitures. C'est du moins ce qu'ils assurent.

Seul un des accusés reconnaît avoir été présent sur les lieux ce soir-là. Son ADN a été retrouvé sur place et son téléphone a été retracé du côté des lieux de l'agression, à Laduz.

Un témoin clef cité à comparaître

Or, dans cette affaire, un homme a déjà été jugé et condamné pour les faits de recel par le tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis). Il a écopé de 30 mois de prison après avoir reconnu, non seulement l'achat des voitures volées dans l'Yonne, mais aussi  pour avoir tenté de les revendre vers un pays étranger. Cet homme a été cité à comparaître comme témoin devant la cour d'assises. 

Les faits : quatre hommes renvoyés devant la cour d'assises de l'Yonne pour vol à main armé, vol avec violence et recel de vol

Ce mercredi, l'audience a de l'avance. Problème. Impossible pour les services du greffe de joindre le témoin. "Je le contacte par Snapchat (un réseau social), mais je n'ai pas son numéro", jure l'un des accusés. L'heure avance mais le témoin n'est toujours pas là. Il habite en Seine-et-Marne. Dans les couloirs du palais de justice d'Auxerre, le mandat d'amené est sur toutes les lèvres. En clair, la police peut aller le chercher de force à son domicile ou à son travail, pour qu'il puisse déposer. 

Mais, un peu avant 17 heures, l'homme escalade les marches du palais de justice. Sur le banc des accusés, les trois hommes paraissent d'un coup tendus. Le témoin est grand et costaud. "Oui j'ai acheté les voitures volées et je voulais les revendre à mon tour", assure-t-il.

S'enclenche alors un dialogue à bâtons rompus entre la présidente de la cour d'assises et le témoin. "Mais à qui les avez-vous achetées ? Qui vous a prévenu que ces voitures volées étaient à vendre ? Qui vous a accompagné dans l'Yonne pour les récupérer ?" Le dos un peu courbé, l'homme reprend : "je ne sais plus". Alors l'avocate générale cite un premier prénom, présent dans la procédure. Mais le témoin assure qu'il s'agit d'un homonyme. L'avocate générale persiste : "comment expliquez-vous que votre numéro de téléphone et celui [d'un des trois accusés] bornent le même jour au même endroit entre l'Yonne et Melun ?" Le témoin a son explication.

"Dans le quartier on se prête tous nos téléphones. C'est peut-être qu'un des trois l'a prêté à quelqu'un qui l'a oublié dans ma voiture, le soir où je suis descendu chercher les autres véhicules."

Un témoin (A la barre de la cour d'assises de l'Yonne)

La présidente de la cour d'assises s'impatiente. "Mais vous connaissez les accusés ?" L'homme se retourne et fait mine de regarder. "Non". "Attendez !, lance la présidente. Attendez qu'ils retirent leurs masques !" L'homme se retourne à nouveau, regarde les accusés dans les yeux moins d'une seconde et répond "non, je ne connais pas ces hommes".

Seul deux des accusés, originaires du même quartier que le témoin, sont reconnus. "Mais je les connais de vue. Je ne traîne pas avec eux." Pourtant, la procédure montre que les téléphones des deux hommes étaient présents aux côtés de celui du témoin. Problème : ces téléphones prépayés n'ont jamais pu être retrouvés, ni analysés. Le silence est tendu. Les accusés s'apaisent. Dès la suspension d'audience prononcée, ils s'entretiennent longuement avec leurs avocats. Ils encourent entre cinq et dix ans de prison.

Passe d'armes entre un enquêteur et les avocats devant la cour d'assises de l'Yonne

Olivier Ceyrac
olivier.ceyrac@centrefrance.com


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